“Il y en a marre des politiques affligeantes menés par de vieux bouffons.” Ces propos tenus çà et là sur la Toile par des femmes au foyer ont conduit en septembre dernier à la création du Parti national des obachan [mot japonais désignant les ménagères d’âge mûr]. Ces redoutables mères de famille se sont accaparé les réseaux sociaux tels que Facebook afin de se lancer dans d’interminables discussions en ligne, aussi bien sur la simple vie quotidienne que sur l’actualité politique ; ce groupe compte aujourd’hui plus d’un millier de membres. Quelles sont les raisons d’un tel engouement pour ce parti fantoche ? Nous avons interviewé l’une des leaders de ces manifestations en ligne, Mayumi Taniguchi, professeure à l’université internationale d’Osaka.
– Comment avez-vous été amenée à fonder ce parti ?
C’était pile au moment où les partis élisaient leurs dirigeants [en septembre 2012]. Je regardais la télé et ne voyais que de vieux hommes en costards, tenant des propos poussiéreux. Sur le coup, j’ai écrit sur Facebook que je créerais bien un parti de “vieilles ménagères” pour contrebalancer la donne. J’ai ensuite été surprise de voir de nombreux commentaires encourageants venant d’autres femmes éprouvant les mêmes sentiments que moi. Poussée par cet élan et par l’envie de créer un lieu où l’on pourrait parler de manière franche de politique, j’ai fini par créer ce “parti”. Je voulais aussi contrebalancer l’image souvent négative des obachan.
Trop souvent, nous n’avons pas la place qui nous serait due dans la société japonaise, une conséquence directe de l’idée selon laquelle une femme perd de sa valeur au fil des années. (...)
– Quels sont les sujets que vous abordez sur Facebook ?
Nous parlons de tout et de n’importe quoi. Des troubles liés à la ménopause aux problèmes de pipi au lit des enfants, en passant par les conflits territoriaux [que le Japon connaît avec la Chine, la Corée et la Russie]. Nous allons même jusqu’à évoquer la situation en Afghanistan. La vie quotidienne est indissociable de la politique. Ce qui est bien chez nous, c’est que, contrairement aux hommes qui ne se soucient que des rapports hiérarchiques, on est unies, on échange des idées d’égale à égale. Même lorsque nous ne sommes pas d’accord, le respect mutuel nous permet toujours d’arriver à un certain consensus.
– Quelles ont été les réactions face à la création de ce parti ?
Les plus réactives ont été les femmes habitant dans des régions où l’homme a tendance à être au centre. J’ai reçu des commentaires me disant qu’elles étaient ravies d’avoir un lieu de discussion, car à la maison personne ne les comprend. Dans notre parti, on peut se mettre d’accord. L’une d’entre elles m’a même confié que, alors qu’elle parlait de politique avec son fils, sa belle-mère l’a interrompue en lui disant qu’une femme n’avait pas à se mêler de ces choses…
– Quel est le but du parti des ménagères ?
On veut redresser le niveau de l’ensemble des ménagères. C’est pour ça qu’il ne faut pas que le mouvement soit uniquement réservé aux femmes de l’élite, comme les médecins ou les professeurs. Le mélange des classes sociales va permettre à celles-ci d’apprendre à s’exprimer avec des mots simples, comme les femmes ordinaires. Et, pour les autres qui ne sont pas habituées à débattre, ça sera l’occasion de s’y entraîner.
– Que pensez-vous de la politique d’aujourd’hui ?
La politique d’aujourd’hui est une politique de vieux schnocks, faite par de vieux schnocks pour de vieux schnocks. Vous vous rendez compte ? Au classement des inégalités entre les hommes et les femmes – établi par le Forum économique mondial selon quatre critères : l’éducation, la santé, l’insertion dans la vie économique et politique –, le Japon est classé cette année 101e sur 135. Si l’on prend uniquement en compte l’insertion politique, le Japon sombre à la 110e place. Il y a de quoi faire retourner dans sa tombe la féministe Fusae Ichikawa, qui s’est battue pour l’obtention du droit de vote des femmes !
Lors des précédentes élections législatives anticipées en 2009, seulement 11 % de femmes ont été élues, alors qu’on sait qu’il faut au minimum 30 % à un groupe pour être influent. Il y en a marre de la lutte de pouvoir entre hommes ! Entre nous, les obachan, on ne perd pas la notion de partage et d’égalité. On est loin des requins à l’affût des plus faibles, qui ne pensent qu’à garder le pouvoir. (...)
Propos recueillis par Kimi Sorihashi
Commentaires
Je passe te faire un petit coucou,
Gros bisous
Salut,
Une belle redécouverte cette région, avec un peut de pluie, mais celà donne du charme....séjour gastronimique oblige ! Bonne fin de soirée.....
Jakin,
Bonjour!
Article très intéressant c'est bien vrai!!!
Bisous
Pas mal dis donc...Il y a de l'énergie et des idées dans ce mouvement
Bonne soirée et bises.Seringa.