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Mâ, de Hubert Hadad

La marche à pied mène au paradis; il n'y a pas d'autre moyen d'y parvenir, mais il faut marcher longtemps.

       C'est par ces mots que Hubert Hadad commence son roman, et ce début évidemment a tout pour me plaire. La suite aussi.

       Shoîchi est un jeune homme timide, tombé éperdument amoureux de Saori une universitaire, plus âgée que lui, qui se noie. Elle avait consacré sa vie à écrire la biographie d'un poète, Santôka, auteur de haïkus. Or la marche comme pour le poète Bashô trois siècles avant, est une fabuleuse source d'inspiration.

       Le récit se déplace de l'histoire d'amour à une biographie. Soishi se lance sur les traces de Santôka, poète qui a réellement vécu: il est né le 3 décembre 1882 et est mort en 1940.

Depuis bien des années, je marche pour ne pas mourir, d'un bour à l'autre de Honshu et des autres îles, celles où l'on ne risque pas de rattraper la queue de son ombre après un jour ou deux. Ma mémoire est mon seul fardeau, le plus lourd en tout cas, pessant comme un cadavre de femme. Un jour à venir, l'été, dans la montagne  aux cigales, l'oubli me gratifiera de ses doux bûchers de lucioles où tout ce que l'on croyait aimer s'efface en cendres bleues avec la nuit montante. On pourrait croire que je cours après mon passé, mais c'est bien pire. Je me souviens du dernier soir comme si c'était demain.

       Ses errances de vagabond, d'ermite, nous conduisent dans les îles du Japon: Honshu, Shikoku, l'île du pélerinage des 88 temples, Kyushu. Mâ est un roman précis et poétique à la fois, émaillé de haïkus. Le kanji  mâ: 間 signifie un espace, un intervalle (dans le temps).

Demain, le jour suivant - qui le dira?

Soyons ivres de ce jour même!