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le 06-11-2011 09:58

La Zonzon, d'Alain Guyard

Dans un précédent roman, Le projet Salomon, Alain Guyard montrait le fonctionnement des loges maçonniques en Languedoc. L'action de La Zonzon se situe dans les prisons, celle de Nîmes et les Baumettes à Marseille. Le narrateur et héros, prof de philo, va "faire réfléchir" dans le milieu carcéral.

Socrate, dans le Phédon, commence à en avoir marre de tous ses petits copains qui lui tannent le cuir sur la vie après la mort, le sens de la vie, les mystères de l'au-delà. Alors il a cette définition, histoire de claquer le beignet à tous ces merdaillons tripoteurs de concepts: "Philosopher, c'est sortir de son trou." Nous autres philosophes du mitard, on était bien d'accord avec ça et on avait vu que ça marchait.

Il se trouve embarqué dans des affaires louches et une histoire d'amour non moins compliquée. Outre les leçons de philosophie (qu'est-ce que la liberté... dans la zonzon, la notion de travail ... pour des caïds, etc), j'ai aimé les portraits des personnages, petits malfrats ou individus dangereux, haut en couleurs, mais très humains, et surtout la langue gouailleuse, argotique et pleine d'humour.

Moi, j'avais le nez dans la violence, j'avais voulu du crapotingue, gratter sous l'immaculé, écorner l'albâtre, contempler en face enfin bouillon de culture et grouillerie bloblocharde, vraie vie, quoi, qui s'accouple avec la mort, baise comme elle assassine, astibloches dans la charogne... Vie! Vie! partout, mais au tribut de la violence et du sang... J'étais servi...

 


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le 05-11-2011 07:32

Elle t'écrivais 3

Mais, plus tard, d’une écriture tremblée, elle t’enverrait des lettres qui parlaient de la solitude. Les lettres devenaient plus courtes. Elle n’eut jamais d’enfants à rendre heureux, elle n’avait plus d’amants. Tu lui téléphonais de temps à autre, Solem, de moins en moins souvent. Elle suivit tes conseils, se soigna, se rangea; elle devint raisonnable. Elle ne sortait plus le soir, mangeait équilibré, regardait la télévision; elle se délectait des faits divers et elle sortait sans ses bijoux en regardant avec méfiance autour d’elle. Elle ne redoutait plus les matins gris ni les soirs d’hiver quand il fait nuit très tôt. Quand tu l’appelais, Solem, tu cherchais quoi lui dire. Et puis, un matin, elle s’assit dans le café en face de chez toi. Elle attendit que tu viennes, tu connaissais tes habitudes. Tu passas près d’elle, tu discutais avec animation. Tes yeux balayèrent la salle, sans voir. Tu ne la vis pas. Tu bus un café au comptoir ; elle ne te quittait pas des yeux; elle allait te tendre la main et tu la saisirais. Tu sortis avant qu’elle ne se soit résolue à s’approcher. Elle rentra chez elle: il y avait comme une douceur dans l’air du mois d’octobre. Elle marcha le long du quai, elle ne souffrait pas tant que cela. Elle rentrerait et sans les lire, elle jetterait les lettres qu’elle ne t’avait jamais envoyées. Solem, toutes les lettres qu’elle t’écrivait.

 


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le 04-11-2011 09:03

Elle t'écrivait 2

Tu le lui avais déjà dit, Solem, on n'oublie pas et on ne se débarrasse pas de l'empreinte du passé. Alors elle se souvenait. Ses pieds se déformaient, ses doigts se rétractaient : mains maladroites, mains impuissantes. Plus jamais elle n’ouvrirait l’étui du violon. Elle t’avait écrit qu’il gisait sur le petit canapé du bureau et se recouvrirait de poussière. Elle se souvenait de ces temps où elle avait des amants ; elle traversait la France pour manger des moules et boire du vin blanc frais, dans des verres embués ; elle roulait toute la nuit, croisait au petit matin des lapins qui traversaient la route, et la campagne tremblait dans la brume bleutée. Elle arrivait à temps pour quelques chansons autour d’un feu. Tu venais rarement, Solem. Et quand tu étais là tu chantais seul un ou deux airs italiens; le silence se faisait. Enfin des rires fusaient, les bavardages reprenaient, quelqu’un tapait dans les mains. Elle travaillait le violon. La vie semblait légère, alors, et faite pour la jeunesse. Elle se souvenait : on disait, il n’y aura plus de guerre, plus d'attentat, on sortira sans avoir peur ; nos enfants seront heureux, vraiment heureux. Elle t’écrivait à présent: te souviens-tu de ce que nous disions ? Elle trouvait que tu étais trop sérieux, Solem, trop sérieux, presque ennuyeux. Mais, plus tard, d’une écriture tremblée, elle t’enverrait des lettres qui parlaient de solitude.
 


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1. prof83  le 04-11-2011 à 18:33:04  (site)

Coucou.
Merci pour ton passage sur mon blog. Ici, dans le Var, il a plu toute la journée.
Bonne soirée.

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le 03-11-2011 12:07

Une Maison au bord des larmes, de V. Khoury-Ghata

Un père tyrannique se venge de ses frustrations sur sa famille, et en particulier sur son fils. Grandissant au milieu de ce conflit, à côté d'une mère dépassée, dans un quartier où la raison n'est pas la chose la mieux partagée, la soeur de ce jeune homme, poète brisé, enfermé dans un asile, prend la relève et deviendra écrivain.

L'enfer décrit par le catéchisme, c'était chez nous, entre nos murs cernés d'orties. Les disputes éclataient comme l'orage. Les reproches, de part et d'autre, charriaient une eau boueuse qui éclaboussait tout.

C'est la naissance de cette vocation dans le Liban des années 1950 à 1975, où la guerre fait rage, que la narratrice -qui est sans doute aussi l'auteur, V. Khoury-Ghata- raconte à la première personne dans un récit qui alterne avec des pages en italiques où elle s'adresse directement à son frère.

Tu écris des poèmes qui font fondre d'émotion ta soeur mais déplaisent à ton père. Pour sortir indemne decette histoire,éviter l'asile, les séances d'électochocs, les fuites pieds nus dans la nuit (...)

il aurait fallu l'accord du père. mais

Le temps ne se retourne pas comme un gant 

Un  récit douloureux, doté d'humour aussi avec quelques personnages fort pittoresques , poétique enfin, à l'image du très beau titre: Une Maison au bord des larmes.

 


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1. la petite fee  le 03-11-2011 à 12:41:50  (site)

bonjour j ai aimé votre rezymé merci
amicalement bisouxxx tendresse

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le 03-11-2011 07:15

Elle t'écrivait 1

Elle t'écrivait, Solem, tous les mots qu'elle n'avait jamais su dire; elle t'écrivait la solitude et l'ennui; et l'impuissance à soulever ce manteau de grisaille; elle t'écrivait  l'indifférence et l'insouciance devant tant de douleur; elle t'écrivait  la vanité des jours passés dans l'ombre de la maison silencieuse, à attendre que le temps s'écoule et que le soir arrive. Non!   Pas le soir justement, pas les soirées interminables à se demander que faire, en attendant de s'écrouler pour quelques heures de sommeil et d'oubli. D'oubli? Tu le lui avais déjà dit, Solem, on n'oublie pas et on ne se débarrasse pas de l'empreinte du passé. Tu le lui avais dit. Et elle ne voulait pas le croire. Elle t'écrivait tandis que la pluie inondait les champs et qu'ailleurs on se battait. Tu lui disais de boire moins. Et elle se répétait, Solem, elle se répétait tes conseils. Mais le ciel était gris, les attentats se multipliaient et l'on avait peur, le soir, de sortir. Sortir d'ailleurs  lui  pesait de plus en plus. Comme si elle devait entrer sur scène: un moment de concentration, allez, il faut y aller. Après on oubliait où l'on était.  Solem, elle t'écrivait du lieu de sa dérive. Elle aurait voulu un jour faire le deuil de tous les échecs et de tous les renoncements. Elle buvait. Tu le lui avais déjà dit, Solem, on n'oublie pas et on ne se débarrasse pas de l'empreinte du passé. Alors elle se souvenait.

 


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1. la petite fee  le 03-11-2011 à 12:43:24  (site)

c est frequent cette envie d allonger ses maux en mots sur piot bout de papier lorke ces mots remplient de maux ne peuvent sortire autrement merciiiii encore de vous lire bne continuation

2. Jeu-de-Dame  le 07-11-2011 à 22:07:49  (site)

C'est non étonnée de te savoir écrivain que je te rends visite, mais je pensais que ce blog était plus fait de voyages... pieds sur terre, pieds à terre...
J'aurais mieux fait de ne pas penser et te visiter plus tôt!

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